Archives mensuelles : mai 2009

La peinture : empreinte identitaire de l’artiste



Question de Marie-Lydie Joffre
Récemment au zoo de Lunaret, j’ai vu des canards élégants vêtus de beige, ocre-or et noir ! Ça m’a fait penser à ta peinture « Espèce de papillon » laquelle m’a fait à son tour rebondir sur un petit projet à partir de la riche matière picturale de l’oeuvre. J’aurais plaisir à présenter la métamorphose de ta peinture en fonction des cadrages, la façon dont le matériau se réincarne selon l’angle de vue proposé, tout en conservant la trace identitaire de l’artiste jusque dans les moindres détails. M’autoriserais-tu à « disséquer » ta peinture, à y fouiller dans les entrailles ?

Réponse de Anne Marie Galata
Chère Marie Lydie, Mais bien sur, je te permets de faire l’autopsie d’un papillon, sorti non de mon imagination mais de la fantaisie de mes doigts, tenant un pinceau. Et puis, lorsque je peins chez toi, ta personnalité ambiante agit sur moi.

Observation de la peinture de Anne Marie Galata« Espèce de papillon », encre de Chine et pigments sur papier aquarelle.
27 x 30 cm, octobre 2008.
Anne Marie Galata a laissé courir le pinceau sur le support de papier ; en retour son exploration tactile du matériau, ressource essentielle pour construire une œuvre de découverte et d’étonnement, loin de toute spéculation, a fait danser sa peinture !
Le matériau est une mémoire, comme la pâte à modeler, l’artiste y est tout entier inscrit dans l’empreinte que trace sa main, quel que soit l’état de l’œuvre, terminée ou en jachère, et on reconnaît sa singularité jusque dans le cadrage serré de son œuvre. Ici, chez Anne Marie Galata, entre autre gourmandise, raffinement des couleurs, humour, amour des animaux…!

Ci-dessous, une interprétation de la peinture Espèce de papillon sous plusieurs cadrages.
(1) la peinture originelle, ( 2) L’oeuvre ayant subi une rotation, (3) un cadrage moyen format, (4) (5) deux cadrages petit format du même motif central sous un angle différent


Ouragan dans la glaise ! L’argile décolle boursoufle tourbillonne, pâte papillonnante gonflée de remous, un papillon bagué d’un nœud de serviette, les ailes incrustées de fossiles crustacés, les papilles perlées de sève d’huître, couvre un oiseau qui vient nourrir au nid, sous le regard inspiré d’un chat en boule

En un tour de rotation à 90° anti-horaire le papillon se retrouve chien, il s’ébroue ses plumes frisent… Son museau de canard pointé au ciel interroge de ses yeux d’ubiquité,
puis caniche à tête de coeur fringant
il se dresse en X, face à sa créatrice !
Et si on lui faisait des coupes sombres dans l’épaisseur de sa forêt de bouclettes, fouillait les schistes de sa toison pour y rechercher des résonances, que trouverait-on ? Ci-dessous, quelques suggestions.

Tombée du ciel, une fleur minérale, à mimétisme animalier, oeil de tigre, yeux de chat, dans toute son ampleur d’écoulements anciens, de gouffres et d’abîmes, d’avalanches de feux, de racines noueuses, de pistils poudreux, de sauve qui peut… lape au reflet de l’étang du crépuscule

Désert d’ambre et terre-verte, rocher à tête d’hermine, long museau de chien à l’affût dans les lavis estompés de montagnes lointaines…

Sous un autre angle de vue, le chien se réveille. Se frotte-t-il les yeux ou est-il frotté d’un baiser de chèvre, sous le regard bienveillant d’un molosse à gueule fleur de feu ?

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« Le féminin pluriel » Marie-Lydie Joffre

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Publication de l’article « Le féminin pluriel » par Audrey Higelin, présenté sous la rubrique « Portrait d’artiste » page 34 à 37 du magazine « Dessins & Peintures » Hors-série n° 18, mai – juin 2009 .

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Le pastel : art d’une image approximative peu détaillée ?

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Réponse aux questions de Leszeck (voir toutes les questions)

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« …De plus, j’ai l’impression que le pastel est un art d’une image approximative, peu détaillée. Plutôt un travail en grandes masses de couleurs »
Le pastel étant composé de poudre, sa texture est mouvante, délicate, voire indécise. De plus, la charge de craie qui aide à dégrader les coloris des pigments confère aux pastels des nuances douces et d’autant plus pâles que la charge aura été importante. Nuances fines, luminosités suaves et souvent des surfaces estompées peuvent conférer au pastel une impression d’approximation.

Les pastellistes du XVIIIe siècle ont beaucoup usé du côté vaporeux du pastel estompé. Les artistes symbolistes aussi. A première vue, le pastel se perçoit de façon sensuelle ; on ressent d’abord la douceur, la sensualité, le velours des grandes masses de couleur. Il émane des pastels une impression de recueillement, de sourdes sonorités de l’intimité, quelque chose de diffus et parfois fugitif, de l’ordre de l’éphémère. Les détails étant plus ressentis que réalistes.

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Du manque de repère, de nombreux artistes ont fait le support de leur inquiétude. Les Symbolistes par exemple pour suggérer le monde secret d’une vie intérieure.

Lucien Lévy-Dhurmer (1865-1953)
Calanque, 6 heures du soir, 1936
Pastel – 66 x 91 cm
Paris, Musée d’Orsay
Photo : Musée d’Orsay

Mais en définitive, et comme tout médium pictural, c’est la manière dont il est traité par l’artiste qui induit le caractère du versatile pastel. Exécuté sous forme graphique par exemple, le pastel gagne en vigueur, en rigueur.
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Peter Stämpfli
Record 1980, Pastel
Fond régional d’art contemporain de Picardie

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