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Degas et le papier-calque (1)

– Etudes préparatoires au fusain sur papier-calque
– Contre-épreuve de dessin au fusain

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Etudes préparatoires au fusain sur papier-calque

Le papier-calque est un matériau que Degas utilise dans sa jeunesse, de façon traditionnelle pour des dessins d’atelier, relevés de routine, repérages, collages, à l’instar de ses contemporains, Puvis de Chavannes ou Gustave Moreau.

Par ailleurs, Degas, grand admirateur de Ingres, se souvient probablement des dessins de travail du maître, la transcription de figures existantes relevées sur calque pour des mises au point d’épure, nus ou portraits, avant de les introduire dans la composition du tableau.

En fin de carrière, vers 1890, Degas choisit le papier-calque comme matériau de prédilection. Et, s’il apprécie le calque en tant qu’outil pour sa souplesse d’emploi, sa facilité à accueillir un dessin, le dupliquer, le transférer, obtenir une forme inversée…, il va faire de ce matériau une fin en soi.

Degas commence toujours par un dessin au trait, généralement au fusain.

Le bâtonnet de fusain se délite tout naturellement lorsqu’il frotte un support de papier dessin présentant une surface texturée, et beaucoup de poussière s’échappe.
En revanche, le bâtonnet maintient sa compacité en glissant sur la surface lisse du papier-calque. Par conséquent, le trait de fusain reste net, précis et nourri. De la tonalité la plus noire à la ligne la plus fine, la plus pâle, c’est un plaisir de ressentir que le calque retranscrit le moindre souffle de la sensibilité ! Les aplats, de même, conservent intacte la matière impulsée par l’artiste, dont la trace perceptible du cheminement gestuel.
Il s’agit, pour conserver les dessins, de les fixer, au risque de soulever un peu de poussière de fusain si l’adhésif est manipulé trop vivement.

Le fusain est un matériau versatile, parfaitement adapté à la complexité de l’art de Degas. Une fois fixé, le trait au fusain est stabilisé. Voilà qui favorisera sa remontée en surface des couches de pastel qui viendront le couvrir.

Sinon, le trait au fusain est provisoire et vite effacé. Une chance pour Degas, artiste perfectionniste, toujours enclin au repentir.

La matière du fusain est dense et crépite comme le bois brûlé ; de quoi réjouir Degas, passionné de dessin, jusqu’à souhaiter qu’on inscrive sur sa tombe « Il aimait le dessin. »

Estompé, le fusain devient fluide, vaporeux. En tant que matériau évanescent, travaillé avec d’autres matériaux de dessin (pastel, graphite, aquarelle etc.) le pastel se laisse volontiers impressionner ! Degas en fera la base de ses pastels.

Le fusain est l’assise des oeuvres de Degas. De la forme la plus simple à la composition la plus élaborée, Degas constitue une réserve de dessins au fusain sur calque dans laquelle il puise pour composer de nouvelles oeuvres.

Il a coutume aussi de copier ses compositions sur le calque, afin de les reporter sur d’autres. Il fait glisser le dessin sur calque par-dessus une œuvre réalisée pour en juger de l’équilibre, en multiplier les figures, en assembler les sujets différemment…

Son dessin au fusain est mis en volume à l’aide de hachures et d’un modelé à l’estompe ou au doigt. Ainsi, obtient-il une surface monochrome qui pourra être par la suite éventuellement rehaussée de pastel ou entièrement peinte au pastel.
Degas signe les dessins au fusain sur calque qu’il considère comme œuvres à part entière.

A gauche, dessin A
Le petit déjeuner après le bain, vers 1880
Fusain sur papier-calque
109,5 x 80,6 cm
Musée des beaux-arts du Canada (18770)

A droite, dessin B
Etude pour la servante dans Le petit déjeuner après le bain
Fusain sur papier-calque
110 x 60 cm
Lefèvre Gallery, Londres

(Reproductions extraites de l’ouvrage « Les pastels de Degas » par Anne F. Maheux, Musée des beaux-arts du Canada, Ottawa, 1988)

Observations :
Les deux fusains sont signés


Le dessin B semblerait être une copie du dessin A. Degas trace habituellement le nouveau trait de la composition à l’extérieur du premier. C’est pourquoi les dimensions du dessin B sont plus grandes

Caractéristiques du dessin B : le personnage est nu, alors qu’il est vêtu dans le dessin A, la naissance du ventre et des cuisses étant discrètement évoquée sous la robe. Finition du dessin, vigueur du trait

Ces personnages serviront de modèle au portrait de servante dans les deux exemples de pastels à la composition presque identique « Le petit déjeuner à la sortie du bain » reproduits aux paragraphes Pastel sur papier-calque et Ajouts de papier-calque

Contre-épreuve de dessin au fusain

A partir de ses fusains sur calque, Degas peut produire également des contre-épreuves ou dessins inversés. (dessins miroir)

Par exemple, le calque monté sur panneau est recouvert d’une feuille de papier ou de papier-calque, puis l’ensemble, aplani. Ainsi la contre-épreuve récupère un peu de la substance du fusain ; elle peut être travaillée par la suite au pastel. Dans cette opération si le dessin matrice perd des particules de poudre, en revanche des particules résistantes se sont incrustées dans ses fibres.

Variante de contre-épreuve : Degas pose une feuille de papier humidifié sur le calque au fusain et passe le tout sous presse. Le transfert de l’image inversée est pâle.

Degas pousse même l’expérience jusqu’à humidifier le calque au fusain, y déposer une feuille de papier dessus puis presser le tout. Sous l’effet de l’humidité, le dessin original s’enfouit dans le calque chiffonné et présente des masses irrégulières grumeleuses qui sont d’une certaine façon ainsi fixées.

Degas a une longue expérience dans sa jeunesse de la gravure à l’eau forte et de la lithographie. Au terme de sa carrière, on pourrait penser qu’il simule les lourdes manipulations des techniques de la gravure avec le matériau immatériel du calque ; comme un transfert au royaume de la spiritualité, quand ses forces physiques commencent à décliner ?

A gauche, dessin A
2 danseuses au repos vers 1895-1903
Fusain et pastel sur papier-calque 57,2 x 44,8 cm
Philadelphia Museum of art
The Samuel S. White III and Vera White Collection (II, 294)

A droite, dessin B
Danseuse au repos vers 1895-1903
Fusain et pastel sur papier-calque
65 x 43 cm
Portugal, Francisco da Cruz Martins (L. 1331 bis)

(Reproductions extraites du livre « Beyond Impressionism » de Richard Kendall, National Gallery Publications, London, 1996)

Observations :
La contre-épreuve (dessin B) a récupéré peu de poudre du fusain original, (dessin A) elle est donc plus claire et moins précise que l’original. Elle fait partie du sort des épreuves que Degas ne retravaille pas

La contre-épreuve restitue, sur la délicate fragilité du calque, la mystérieuse apparition de l’œuvre, toute de tendresse, plus effleurée qu’imprimée, et ouvre la voie à l’imaginaire que le dessin non fini sollicite de l’infini !

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A suivre

Degas et le papier-calque : Introduction

(1)
Etudes préparatoires au fusain sur papier-calque
Contre-épreuve de dessin au fusain
(2)
Fusain, sur papier-calque, rehaussé de pastel
Pastel sur papier-calque
(3)
Oeuvres en série sur papier-calque
Ajouts de papier-calque
(4)
Fixation du pastel sur papier-calque
Montage du pastel sur papier-calque
(5)
Ultimes pastels sur papier-calque



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